Il n’y a pas vraiment eu de suspense à l’Assemblée nationale.
Les motions de censure opposées à Edouard Philippe et son recours au 49-3 pour faire passer la réforme des retraites ont été rejeté. La réforme des retraites a été adoptée « de facto » en première lecture.
Adoption de la réforme après le rejet des motions de censure
Les motions de censure présentées à gauche et à droite contre le gouvernement et son recours au 49-3 pour faire passer la réforme des retraites n’ont pas séduites les députés. Elles ont été rejetées sans surprise dans la nuit du mardi 3 au mercredi 4 mars par l’Assemblée nationale.
Après 13 jours d’un parcours sans précédent à l’Assemblée en première lecture, le Premier ministre Édouard Philippe avait annoncé samedi le recours surprise au 49-3, cet outil constitutionnel permettant de faire adopter le texte sans vote, en engageant la responsabilité du gouvernement.
La motion du groupe Les Républicains (LR) a recueilli 148 voix et celle des trois groupes de gauche (Parti communiste, Parti socialiste et La France insoumise) 91 voix, loin de la majorité absolue de 289 suffrages nécessaires pour faire tomber un gouvernement. Seules les voix favorables à la motion sont comptabilisées.
Vous déposez deux motions de censure ? C’est parfaitement votre droit. Chacun l’assumera devant les Français. Mais cela ne nous empêchera pas de continuer à réparer notre modèle social pour l’adapter à d’autres défis. #DirectAN #Retraites pic.twitter.com/Mdqk7n9utA
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En vertu de l’article 49.
3 de la Constitution, le projet de loi sur la réforme des retraites a donc été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale, près de trois mois après le début d’une mobilisation nationale interprofessionnelle contre la réforme portée par le gouvernement.Défendant la motion commune PCF-LFI-PS, le communiste André Chassaigne avait dans l’après-midi critiqué un «désastre démocratique», après le recours à l’arme «funeste» du 49.
3. «Vous avez fracturé le pays», avait renchéri la députée socialiste Valérie Rabault, tandis que Jean-Luc Mélenchon (LFI) dénonçait un 49.3 «décidé sournoisement», promettant la poursuite d’une «guérilla populaire et parlementaire, pacifique».
« L’objectif reste le retrait de votre réforme et nous allons y arriver. Ça prendra le temps qu’il faut mais nous allons y arriver. En toute hypothèse, quoi qu’il arrive, si jamais nous venions à trébucher, alors, dès 2022, nous annulerons tout ce que vous avez fait. » pic.twitter.com/x4GCwBvTlv
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Les députés RN avaient prévu de voter la motion de gauche, de même qu’une majorité du groupe Libertés et territoires.
La députée apparentée LREM Albane Gaillot, qui s’était mise en retrait du groupe majoritaire en septembre 2019, s’est également prononcée pour.«Mon vote n’est pas un vote de censure ou de sanction du gouvernement, il est un vote contre le 49.
3», a-t-elle précisé dans un communiqué cité par l’AFP. Les élus LR n’ont pas joint leurs voix à celles de la gauche, ne voulant «pas de confusion avec ceux qui sont dans le blocage, l’obstruction et le déni de réalité», selon les mots de leur chef de file Damien Abad.Le député Gilles Le Gendre (LREM) a lancé, sous des huées des auteurs de milliers d’amendements contre la réforme des retraites : « Le 49-3, c’est vous ! »
Edouard Philippe, le Premier ministre, a lui tenu à insister sur une réforme de « justice sociale ».
Il a en effet déclaré : « Ceux qui défendent le statu quo (…) racontent bien trop souvent des calembredaines.
» Récusant tout « coup de force », il a observé qu’il aurait fallu « huit semaines », week-end compris, pour arriver au bout.Avoir une minorité qui « bloque systématiquement les questions de fond » n’est pas à l' »honneur du débat parlementaire », a ajouté Édouard Philippe, vantant un « texte de compromis » avec l’intégration de 180 amendements issus des différents bancs et des discussions avec les partenaires sociaux.
« La majorité réaffirme son soutien franc et massif au gouvernement », ont estimé plusieurs « marcheurs » après le rejet des motions.
Quelle suite suite pour la réforme ?
Le texte de la réforme des retraites devrait désormais passer devant le Sénat, qui doit l’examiner au mois d’avril.
Ce mercredi, les députés débattront des 1 800 amendements qui accompagne la réforme des retraites.
Après un passage au sénat et un retour à l’Assemblée, le gouvernement vise toujours une adoption définitive avant l’été.Le processus de navette parlementaire désigne la transmission et l’examen successif d’un projet ou d’une proposition de loi, par l’Assemblée nationale et le Sénat, en vue d’aboutir à une adoption dans des termes identiques par les deux chambres dans le cadre de la Procédure législative.
Edouard Philippe a déclaré que la réforme des retraites poursuivra son chemin : « Cela ne nous empêchera pas de réparer notre modèle social pour l’adapter à d’autre défi. Nous devons le réparer lorsqu’il fonctionne moins bien pour le transmettre à nos enfants ».
Pour autant, les opposants à la réforme continuent le combat dans la rue. Ils ont manifesté à nouveau ce mardi à Paris et en province.
Un manifestant a déclaré : « On voit bien que le gouvernement est disposé à passer en force et imposer ses réformes quoi qu’il en coûte et à se passer y compris du débat parlementaire alors qu’il a la majorité. Voilà, on va voir si ça permet de relancer un peu le mouvement ».
Benoît Teste, le secrétaire général de la FSU, a lui déclaré : . »Est-ce qu’on continue à assurer aux retraités demain un niveau de pension correct ou est-ce qu’on leur donne vaguement de quoi survivre. C’est ça la vraie question ».
L’adoption de la réforme devant l’Assemblée Nationale ne fait pas non plus le bonheur des avocats, très fortement opposés à la réforme. Ces derniers ont voté la poursuite de la grève « jusqu’au 25 mars inclus ».